Système solaire combiné (SSC) : retour d'expérience sur un système géothermie - ballon solaire [Interview]
Par Olivier d'ImmobilierEcologique.fr le vendredi 20 juin 2014, 10:59 - Lien permanent
Yvon est architecte, il est spécialisé depuis longtemps dans les domaines de l’éco-construction (neuf et rénovation) et dans les bâtiments basse-consommation.
En 2005, il décide avec sa femme de construire une maison en bois écologique, un choix en accord avec leurs convictions citoyennes et leurs pratiques professionnelles.
Leur maison bioclimatique a été construite selon un cahier des charges écologique assez strict : ossature bois, matériaux à 99,8 % d’origine biosourcée, géothermie horizontale, chauffe-eau solaire, etc.
Avis aux amateurs puisque leur maison en bois, près de Rouen, en Seine-Maritime (76), est à vendre.
A travers son témoignage, Yvon nous livre ici gentiment son retour d’expérience et son avis sur son système combiné géothermie - ballon solaire, une installation reposant sur le système Vitocal 343 de chez Viessmann.
N.B. : Ceci n'est PAS un article sponsorisé.
Pompe à chaleur géothermique et chauffe-eau solaire : le système et son choix
Pouvez-vous nous décrire brièvement votre installation ?
Le principe de mon installation de chauffage et de production d’eau chaude sanitaire en un système combiné compact repose sur la juxtaposition de 2 systèmes distincts :
- une PAC (pompe à chaleur) eau/eau, fonctionnant avec un lit de captage enterré de plus de 450 m²,
- un ballon solaire raccordé à 4 m² de panneaux solaires thermiques plans (positionnés sur le versant Sud de la toiture).
Le tout étant regroupé dans un seul appareil : la Vitocal 343 de chez Viessmann.
Pouvez-vous nous en dire plus sur le ballon solaire et son fonctionnement ?Comme tout chauffe-eau solaire, le ballon est composé de 2 parties distinctes :
- la partie basse est dédiée aux apports solaires (120 litres environ),
- la partie haute (120 litres également) est chauffée avec le ballon du bas si l’ensoleillement le permet, et avec l’appoint de la PAC si le soleil se fait rare.
C’est-à-dire, de façon schématique, que l’été nous disposons de près de 250 litres d’eau chaude, renouvelables très rapidement dans la journée, et que l’hiver, la capacité est plus restreinte puisqu’on fonctionne presque exclusivement sur les apports de la géothermie.
C’est la raison pour laquelle, lors des périodes de grand froid (qui sont rares chez nous), je bascule la production d’eau chaude sur un ballon électrique d’appoint, pour donner priorité à la PAC pour les seuls besoins de chauffage. Mais cela ne dure que quelques semaines dans l’année. Cette année, par exemple, le temps étant particulièrement doux, je n’ai pas encore basculé la production d’eau chaude.
La capacité de la PAC à fournir de l’énergie, via le réseau enterré de tubes d’eau glycolée, est forcément limitée, et donc, en hiver, il convient de préserver cette ressource. Le chauffage de la maison se faisant en basse température (30 °) via les planchers chauffants, il est donc préférable de dédier cette énergie en priorité aux besoins de chauffage, plutôt que pour l’ECS qui demande une température d’au moins 55 °C.
Une PAC, quelle que soit sa source d’énergie (géothermie, aérothermie, aquathermie,…) doit fonctionner de préférence sur de la basse température, puisqu’elle intervient surtout sur le delta T du départ et du retour. Plus on demande de la haute température, plus on épuise la source d’énergie renouvelable. C’est donc tout l’intérêt de ce système mixte où l’ECS est produite en priorité par le solaire.
Qu’est-ce qui vous a incité à faire ce choix ?Cette machine est sortie juste au moment de la conception de ma maison (fin 2005), et je l’ai découverte sur un salon.
Le concept m’a évidemment tout de suite séduit, car réunir 2 systèmes à énergie renouvelable dans un seul appareil m’apparaissait comme une aubaine, notamment pour le gain de place qu’il représentait, et la possibilité que la machine offrait d’avoir un appoint avec la géothermie lorsque le soleil normand se fait rare, notamment en hiver.
Le terrain sur lequel j’avais choisi d’y édifier la maison n’étant desservi que par le réseau d’électricité, cette solution « tout en un » m’a convaincu de ses avantages.
Géothermie horizontale et panneaux solaires thermiques : la conception et la mise en oeuvre
Comment vous y êtes-vous pris pour dimensionner la surface de captage pour la géothermie ?
Tout d’abord, j’ai eu du mal à avoir les bonnes informations quant à la surface de captage à réaliser. Ni Viessmann, ni REHAU (le fournisseur des tubes PER à enfouir), n’ayant un discours très clair sur les abaques à respecter, j’ai dû me faire moi-même mon idée.
Néanmoins, les docs techniques de Viessmann préconisent des surfaces de captage en fonction de la nature du terrain, selon qu’il est plus ou moins argileux ou sablonneux, et appliquent une relation entre la quantité d’énergie (en watts), la longueur de tube au m² (en fonction du pas), la surface à chauffer et la surface du lit de captage.
J’en ai donc déduit de façon très empirique que mon sol avait un rendement minimum d’environ 20 W/m² à 0,90 m de profondeur. Cette valeur de 20 W/m² était sans doute sous-estimée, mais je préférais avoir une marge dans mes calculs. La puissance captée dont avait besoin la PAC étant d’environ 7 kW, la surface du lit de captage à réaliser était donc de 350 m², soit à peu près 2 fois la surface à chauffer. Cette proportion de 2 fois la surface à chauffer se retrouve dans plusieurs manuels sur le sujet.
La profondeur idéale varie également d’un ouvrage à l’autre. Certains préconisent une profondeur de 70 à 80 cm (juste hors gel), alors que d’autres conseillent plutôt 1 m à 1,20 m.
Il ne faut pas oublier que dans ce genre de captage enterré, l’énergie renouvelable est davantage celle du soleil que celle de la terre. En effet, on ne peut pas vraiment parler de « géothermie », puisque ce terme s’applique surtout pour les systèmes profonds (à 100 m ou plus) utilisant des sondes thermiques sèches, ou bien de l’eau chaude provenant des entrailles de la terre.
Là, dans notre cas de figure, il s’agit en fait de l’énergie du soleil stockée dans la couche superficielle de la terre. On pourrait plutôt qualifier cette énergie de « géosolaire ». J’ai donc décidé d’enfouir le réseau de tubes d’eau glycolée à 0,90 m de profondeur, en y ajoutant une couche de sable sur 10 cm en fond de forme.
Qu’en est-il de l’installation des panneaux solaires et de l’appareil ?
Pour les panneaux solaires, il n’y a rien de particulier, ni pour l’installation de la machine qui reste d’une relative simplicité. En tous les cas, l’installation est beaucoup plus simple qu’avec une chaudière au gaz, par exemple.
La surface des panneaux solaires étant cadrée par le fabricant allemand, les 4 m² prévus se sont révélés suffisants et efficients.
Installation géothermique et ballon solaire : l’usage
Comment est gérée la régulation du système ?
Le premier hiver (2006-2007) ayant été particulièrement doux, le fonctionnement du système combiné s’est révélé efficace et suffisant pour assurer nos besoins de chaleur.
La régulation du plancher chauffant se faisant uniquement grâce à une sonde extérieure, les apports gratuits d’hiver nous apportent parfois même des surchauffes hivernales pouvant atteindre parfois les 24 à 25 °C dans le séjour très largement ouvert vers le Sud.
Mais cette régulation est parfaitement maîtrisée par la machine puisqu’elle mesure la température d’eau du retour et celle de départ, et agit ainsi sur la quantité de chaleur à envoyer dans les planchers chauffants.
J’estime qu’une sonde d’ambiance intérieure ne servirait à rien, si ce n’est à générer des conflits entre les 2 sondes ou à refroidir les zones non ensoleillées.
Ma femme se plaignait néanmoins du bruit de la PAC lorsqu’elle redémarrait, notamment la nuit. Mon frigoriste m’avait d’ailleurs confirmé que le compresseur (de marque Scroll), d’après lui, avait un niveau sonore un peu trop important et m’avait conseillé de le signaler à Viessmann.
Quant à l’eau chaude, le réglage de température est légèrement optimiste : il ne faut pas hésiter à forcer la consigne jusqu’à 60 °C pour avoir de l’eau à 50 ° au robinet. Mais çà marche. Ou du moins çà a marché… jusqu’à…
Système solaire combiné (SSC) : les problèmes rencontrés
Quels sont les problèmes que vous avez rencontrés ?
Çà a marché jusqu’à l’hiver suivant (2007-2008) où les températures, dès le mois de décembre sont descendues très bas, à des valeurs de -10 à –12 °C.
Et là, vers le 18 ou 19 décembre 2007, nous avons connu la première série de problèmes : la PAC se mettait en sécurité, coupant ainsi la production de chaleur et la distribution de chauffage. Lorsqu’on la relançait, elle repartait mais les déclenchements de sécurité se sont faits de plus en plus fréquents, mettant le système complet hors service, c’est-à-dire plus de chauffage ni d’eau chaude ! Le bonheur.
Comment avez-vous résolu ces arrêts ?Le technicien de chez Viessmann n’est intervenu que début janvier 2008, et a fait quelques réglages sur la machine avant de déclarer que probablement notre surface de captage n’était sans doute pas suffisante. Bonne nouvelle ! Merci Viessmann.
Ce problème s’est à nouveau manifesté dans le courant de l’hiver, dès que les températures devenaient négatives. Puis l’hiver suivant également.
La solution, pour relancer la machine, consistait à baisser la consigne de température de l’eau chaude. Aussitôt le chauffage se remettait à fonctionner normalement. En fait, j’en ai déduit une chose : lorsque la température extérieure devient très basse et que le soleil ne peut pas subvenir aux besoins du ballon en eau chaude, l’énergie géothermique est donc directement utilisée pour chauffer l’eau à 55 ou 60 °, ce qui a pour effet d’épuiser les calories du sol, au point d’être en sous capacité pour assurer les besoins en chauffage.
Pour finir l’hiver dans de bonnes conditions, j’ai donc demandé à mon plombier de m’installer, juste à côté de la PAC, un ballon électrique d’appoint, que je faisais fonctionner, dès que les températures extérieures devenaient critiques.
Parallèlement, je tannais Viessmann sur leur compresseur de plus en plus bruyant.
Energie géosolaire et solaire thermique : les solutions apportées
Vous avez choisi une autre solution pour en finir avec ces mises en sécurité ?
Durant l’été 2009, afin de ne pas risquer de donner raison à Viessmann, j’ai quand même décidé d’étendre la surface de captage, en réalisant 100 à 120 m² supplémentaires, sur une autre partie du jardin qui n’était pas encore plantée.
Effectivement, durant l’hiver suivant, nous n’avons plus subi aucune mise en sécurité, et le fonctionnement du système est redevenu normal.
Qu’en est-il du compresseur ?A peu près à la même époque, sans que je les relance, Viessmann s’est enfin décidé à changer le compresseur Scroll. Je reste persuadé qu’ils s’étaient aperçus d’un problème sur une série, et ont décidé de procéder au changement des pièces défectueuses. Un peu comme les constructeurs automobiles lorsqu’ils « rappellent » des centaines de voitures soupçonnées d’avoir un défaut de fabrication.
Par ailleurs, depuis, ma femme ne se plaint plus du bruit de la PAC la nuit. Le compresseur fonctionne donc normalement.
Géothermie, chauffe-eau solaire, hydroaccumulation, plancher chauffant : retour d’expérience
Quel est votre avis sur cette installation ? Que changeriez-vous si tout était à refaire aujourd’hui ?
En conclusion, le système combiné est très séduisant sur le papier mais il faut faire attention à deux choses :
- à la surface et la qualité du lit de captage, en fonction de la nature du sol,
- à la capacité de la machine à produire de l’eau chaude sans faire appel à la géothermie, lorsque le soleil est absent.
Je ne reviens pas sur les problèmes du compresseur, car j’estime que cela peut arriver à tous les fabricants de matériel. D’autant plus que Viessmann équipe ses PAC de compresseurs américains Scroll, qui restent une des meilleures marques dans ce domaine.
J’ai tout de même conservé le ballon d’appoint, au cas où… On ne sait jamais, en cas de -15 ou –20 °C, je garde la possibilité de basculer la production de l’eau chaude sur le ballon électrique afin de soulager la PAC et donner la priorité au chauffage.
Et si c’était à refaire, évidemment, je dissocierais les deux systèmes, car depuis, j’ai acquis la conviction qu’il est un peu contre nature de demander à un même appareil de générer à la fois de la haute et de la basse température (60 ° et 35 °). L’énergie géosolaire est tout à fait adaptée pour produire de la basse température pour le chauffage, mais pas pour l’eau chaude. Or, l’énergie solaire, en Normandie, est très peu efficiente durant l’hiver. Le système combiné Géothermie-Solaire, doit certainement être plus approprié sous des latitudes plus méridionales. Moins froid et plus ensoleillé, çà doit être parfait.
Système solaire combiné : et vous ?
Etes-vous prêt à vous lancer ?
Ou si vous avez déjà installé votre système solaire combiné, en êtes-vous content ?
Avez-vous des remarques, des conseils, des questions ?
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Crédits photos :
- L'illustration du fonctionnement du ballon solaire et celle du compresseur : source Viessmann.
- les autres visuels : les propriétaires de la maison en bois à vendre près de Rouen.
Commentaires
Bonjour j'aimerais savoir combien coute au total, une telle installation. Géothermie + pompe + panneau solaire, tous les tuyaux cables...........
C'est surtout pour avoir une idée..
Merci beaucoup.
Réponse à Anthony : Une telle installation coûte entre 18 et 20000 €, hors terrassements.
Ce dernier poste dépend essentiellement de la nature du sol et de sa topographie. S'il est trop argileux il faut lui rapporter du sable (plus perméable), et s'il est trop sableux, il est préférable de lui adjoindre de la terre plus hydrophile. Le but étant d'avoir un lit de captage qui baigne toujours dans l'eau. C'est l'eau contenue dans le sol qui transmet les thermies au tube. Une terre trop sèche créerait du retrait, donc un vide d'air peu propice à l'échange de chaleur. Une terre trop humide saturerait le système et risquerait de geler.
Pour un terrain avec un bon sol, qui ne nécessite donc pas d'apport extérieur, comptez 4 à 5000 € supplémentaires de terrassement.
Cordialement Yvon